Vertical utopia
2023
Vertical Utopia explore la morphologie urbaine en Corée du Sud en illustrant la croissance fascinante du pays, mieux connue sous le nom de « Miracle de la rivière Han ». L’analyse est faite du point de vue des « Tanjis », ces unités d’habitation massives et standardisées apparues dans les années 1970 dans le paysage urbain sud-coréen. L’émergence des Tanjis, conséquence de la croissance fulgurante du pays, a été perçue comme une solution à l’urgente pénurie de logements, rendue possible par le concept de préfabrication dans les processus de construction.
Les Tanjis en Corée du Sud ont été soutenus par les autorités publiques et présentés comme un modèle du monde contemporain ou encore comme un symbole de richesse matérielle. Aujourd’hui, ils représentent plus de 60 % du marché du logement sud-coréen et ont ainsi essaimé à travers tout le pays.
La population semble accepter cette réalité mais cela révèle un manque d’alternatives. En effet, un changement de paradigme a eu lieu dans les années 70, faisant des Tanjis le type de logement dominant. Jusqu’à la fin de la guerre de Corée, le pays était majoritairement composé de maisons individuelles, et l’horizontalité prédominait. Les années 1960 ont vu apparaître les premiers immeubles, puis les immenses Tanjis dans les années 1970. La verticalité a alors envahi le territoire. Cela a généré une uniformisation architecturale et paysagère, des dysfonctionnements dans les tissus urbains, une hausse des prix de l’immobilier, ainsi que la disparition des quartiers traditionnels et des communautés qui y étaient implantées.
Il semble que la grande majorité des bâtiments soient construits par des entreprises nationales sans intervention d’architectes. Dans l’environnement urbain, les rares vestiges de l’architecture traditionnelle subsistent à travers les anciennes portes, les temples ou les maisons Hanok. Ou, plus tristement encore, ils sont intégrés à des bâtiments commerciaux de grandes enseignes américaines, détournant les formes de toitures de l’architecture traditionnelle.
La forte présence encore aujourd’hui de chantiers de Tanjis dans tout le pays, aussi bien en zone urbaine que rurale, démontre la croissance continue et l’adoption de ce modèle d’habitat par les Sud-Coréens, qui voient les Tanjis comme un symbole d’ascension sociale et de distinction.
Alors que la France a connu des résultats contrastés avec ses « Grands Ensembles », souvent associés à une fragmentation urbaine, à la concentration de populations dans des milieux défavorisés et à un désengagement des autorités publiques, la Corée du Sud a su adapter ce modèle à son propre contexte, parvenant dans certains cas à favoriser des communautés plus équilibrées et des dynamiques sociales plus cohésives.
La forme architecturale austère et dénuée d’identité propre de ces paysages préfabriqués est fascinante mais il est d’autant plus troublant de constater qu’une étrange forme d’utopie a émergé de ce phénomène.
Bien que les Tanjis aient incarné une solution à l’urgence du logement, leur héritage aujourd'hui semble contradictoire : un symbole de réussite devenu un modèle à déconstruire ?




























